Est-il dangereux de se faire vacciner lorsqu’on a déjà eu le coronavirus ? 03 mars 2021
Soucieuse de lutter au quotidien contre les fausses informations, l’équipe des Vérificateurs a noué un partenariat avec l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Objectif : interroger les chercheurs les plus aguerris et répondre aux questions que se posent les internautes sur le coronavirus et la vaccination. Dans ce premier épisode, nous traitons la question d’Emmanuelle, envoyée à l’adresse mail dédiée lesverificateurs@tf1.fr.
Elle s’interroge sur le délai avant de se faire vacciner pour une personne qui a déjà eu le virus. Et sur l’éventualité d’un vaccin « dangereux » pour un asymptomatique qui ignore avoir contracté la maladie.
On ne peut pas se faire vacciner si l’on a attrapé le Covid-19 ?
Depuis le début de l’épidémie, plus de trois millions de personnes ont contracté le Covid-19 et en ont guéri. Un nombre qui va doubler selon les derniers calculs de l’Institut Pasteur, pour qui 17% de la population en métropole a contracté la maladie. Autant de personnes qui n’ont donc a priori pas besoin de recevoir une des précieuses doses. « D’un point de vue immunologique, il ne me semble pas que la vaccination des personnes ayant déjà contracté le virus soit une priorité », confirme Béhazine Combadière, directrice de recherche à l’Inserm. C’est dans cet esprit que la Haute autorité de Santé (HAS) avait publié un premier avis sur la question, le 18 décembre. Observant que les données ne permettaient pas « de savoir s’il y a un bénéfice à vacciner les personnes qui ont déjà été infectées », l’autorité publique avait estimé qu’il n’y avait « pas lieu de vacciner systématiquement les personnes ayant déjà développé une forme symptomatique de la Covid-19 ». L’administration a cependant fait machine arrière. Et elle recommande dorénavant une seule dose, prise au bout de trois mois.
Pourquoi ce délai, qui inquiète l’internaute qui nous a contactés ? « C’est la durée pour que la mémoire immunitaire se mette en place », répond l’experte de l’Inserm. « Il faut un certain temps pour créer cette mémoire et nous considérons, grâce à l’observation des virus en général, que ce délai est de trois mois. » Raison pour laquelle les personnes ayant été positives sont « considérées comme protégées pendant au moins trois mois par l’immunité post-infectieuse », écrit la HAS.
Ce délai n’est donc pas lié à un potentiel caractère dangereux. « Il n’est absolument pas contre-indiqué de se faire vacciner après contamination », répète la chercheuse au centre d’immunologie et de maladies infectieuses, « même si l’on vient de l’avoir ou bien si l’on a eu des formes asymptomatiques ». Auprès de LCI.fr, elle explique en effet qu’une réponse immunitaire ne peut pas être néfaste. « Une fois que le corps a vu le virus, qu’il a une réponse, le vaccin vient juste relancer le système immunitaire en lui remontrant du virus. »
Pourquoi un délai de trois mois ?
Si ce n’est pas dangereux, pourquoi respecter ce délai de trois mois ? Tout simplement parce la France ne dispose pas assez d’approvisionnement. « Pour la population en bonne santé qui a déjà eu le virus, étant donné la situation actuelle d’un manque de doses, il n’y a pas d’urgence à se faire vacciner », résume la chercheuse.
Néanmoins, il y a un bémol. L’immunité sur le long-terme des personnes précédemment infectées n’est pas connue. « Les réponses immunitaires après infection sont variables et plus ou moins importantes. Il faut être sûr d’atteindre de bons niveaux d’immunité », souligne la directrice de recherche. Raison pour laquelle, après avoir estimé en décembre dernier qu’il n’y avait « pas lieu de vacciner systématiquement » ce public, la Haute autorité de Santé a changé ses recommandations.
On peut donc combiner la protection « naturelle » à celle du vaccin ? « Absolument », répond notre interlocutrice. La dose unique de vaccin viendra simplement jouer un rôle de rappel. « C’est le même principe que le rappel tous les dix ans », avance-t-elle, avec pédagogie. « On demande au système immunitaire de se souvenir comment il combat le virus. C’est bon pour la mémoire immunitaire. » Et de prendre un exemple tout à fait ordinaire : « C’est comme regarder une photo à intervalles réguliers, pour être sûr que le souvenir du moment reste intact. »